mardi 4 décembre 2007

N° 10 Saint Sixte, la plaine alluviale et le souvenir des mariniers de Garonne, 10 km, dénivelée 40 m.

Carte de Cassini

Dans l'angle qui voit le fleuve changer d'orientation lors de sa butée contre la serre où domine le château de Goth (écrit Gouts à l'occitane), on peut lire Le Double. Bien qu'écrit sur la rive droite, le hameau des batteliers se situait bien rive gauche. On voit nettement au bas de la carte, bien que de peu d'altitude, la première terrasse de Garonne où le fleuve, là aussi contraint, à viré à droite. En cas de crue, ces changements de direction accroissent la vitesse des eaux.


Sous un ciel incertain après la pluie fine du matin, nous décidons d'éviter les pentes un peu glissantes et de traverser la Garonne pour nous rendre, rive gauche, aux portes du Tarn et Garonne. La vallée est étroite à cet endroit qui a forcé le fleuve à modifier son cours. Butant au nord contre la couronne calcaire qui culmine à 170 mètres, il a dû bifurquer à l'ouest, sa seule échappatoire possible.
Nous sommes à Saint Sixte et nous nous sommes garés...place de la Batellerie. Cette bourgade, placée sur la première terrasse de Garonne ne surplombe que de quelques mètres, la vallée qui mène au fleuve tout proche. Toutefois ces quelques mètres sont vitaux pour échapper aux caprices et colères des eaux.


La qualité des images vont pâtir d'une lumière capricieuse et même par moment défaillante.





St Sixte, place de la Batellerie.




Sur la route, une maison de briques crues encore debout.


Le clocher de l'église, très inhabituel, témoigne d'un savoir-faire de charpentier qui emprunte beaucoup aux formes de carènes de bateaux.
Avant la construction du canal et l'avènement du chemin de fer, et bien que le fleuve ne soit navigable qu'environ 5 mois l'an, beaucoup de transports empruntaient les bateaux qui circulaient parfois à grands risques. Les berges servaient de voies de halage et on y cultivait également des saules nommés "jetins". Des familles se sont taillé fortunes et ont parfois rayonné jusqu'à Pondichery après avoir participé au commerce triangulaire...De belles et riches maisons témoignent de ce temps là comme nous avons pu le voir également au Treil et à Mary dans le dernier sujet. Il en est ainsi tout le long de Garonne.



Belle maison du bourg.








Ci-dessus, une vieille maison restée figée dans le temps avec sa "réclame" d'un autre temps et la planche horizontale taillée à même un tronc d'arbre non équarri. De nos jours le village est en déclin. Seules les belles demeures tirent leur épingle du jeu, les maisons plus modestes, étirées le long de la route qui suit l'élévation de la terrasse qui met le village hors d'eau, sont à vendre ou se meurent..





Pradère





Tout le long de Garonne, les bâtiments seront majoritairement construits de briques et de galets. Celui-ci, tout en long, flanquée de deux "tourelles" en fait partie. Il est situé dans une boucle de l'Auroue, petite rivière qui se jette dans la Garonne à St Nicolas de la Balerme, lieu où se trouvait une ancienne minoterie.







Nous suivons l'Auroue sur environ 2 km sans trouver le pont que nous devons passer, face à un chemin commun à un autre circuit. Hélas, le seul que nous ayons vu est celui de la Rivière et, non content d'être plus avant ce passage, il avait l'air privé. Comme il n'y a aucun balisage et il n'y en aura d'ailleurs aucun, nous décidons de continuer en bordure de l'Auroue jusqu'au pont.

L'Auroue



Il y a peu d'eau mais le débit est régulier.





Le ciel nuageux rabat les vapeurs de la centrale nucléaire de Golfech au-dessus d'une levée de terre, à moins d'une dizaine de kilomètres.

Que va-t-il advenir de Saint Nicolas de la Balerme qui a perdu le contact avec Saint Jean de Thurac en perdant son pont suspendu?

Maison de St Nicolas, dont la construction est datée à 1912-14



Autre maison en brique de bord de Garonne .

Croix de mission, tout rappelle la fin du XVIII° siècle.

Église de Saint Nicolas de la Balerme

Encore et toujours une maison de briques

Garonne à l'approche du pont détruit. Au loin le virage à angle droit qui remonte en aval avec l'avancée de la plage de sable qui s'est déposé.

Ici le pont prenait son élan pour survoler le fleuve.



Et se posait là, avec élégance....

Il y avait beaucoup de ponts suspendus sur la Garonne, témoignage d'un savoir-faire des ingénieurs de cette époque. Celui de St Nicolas de la Balerme avait été construit en 1840.



Le château du Goth vu au-dessus des champs d'actinidia, nom des lianes à kiwis. La Garonne, étranglée dans l'angle entre ces deux lieux se fait totalement oublier.
Après le hameau de la Balerme nous nous dirigeons vers les terres inondables enserrées dans l'angle que fait le fleuve face au bourg de Laspeyres, "les pierres" en occitan, bâti dans l'espace restreint compris entre les eaux et la serre qui en moins de 300 mètres va s'élever à 170 mètres d'altitude, à l'emplacement d'une tour ruinée située dans l'axe exact de Garonne vers Donzac. C'est là que culmine également le château du Goth avec les mêmes avantages et sans doute une vue magnifique vers le sud-est.


Les lianes d'actinidia qui viennent d'être taillées, font une arche au-dessus de ce chemin d'accès.

Ici la taille a été plus sévère: les plans semblent plus jeunes et peut-être ont besoin de plus de discipline ?...

Deux rescapé de la dernière récolte !



Et un beau spéciment encore vert sous sa rugueuse robe de bure !



Au lieu-dit Perdien, nous croisons une surprenante "exposition" d'engins agricoles de tous âges !



Et d'autres encore...

...suivis de longues remorques pour tracter les cageots pleins de fruits.


Un chemin descend vers la Garonne qui, dans l'angle dépose sables et galets, la force du courant s'exerçant sur la rive adverse où il va trouver une vigueur renouvelée. Cette"plage" inattendue, presque secrète, nous permet une nouvelle respiration, contenue par le passage dans l'étouffante forêt d'actinidias.



L'immense plage de sable déposé rive gauche par l'accélération de l'eau contre le calcaire en face, rive droite.
Au sol, une myriade de petites tâches blanches se révèlent être d'étonnants petits coquillages vides, déposés là par les courants. Il y en a partout ....Ici c'est un lieu où on se sent loin du monde...




Ici, j'ai retourné deux de ces coquillages qui sont majoritairement pleins de sable, donc avec la coquille extérieure peu visible, afin de mieux voir leurs raies noires sur fond blanc.


Autrefois on faisait à Tonneins des boutons de nacre avec ces coquilages qui sont présents tout le long du cours du fleuve, j'ai appris cela aujourd'hui. Décidément on ne gâchait rien autrefois!



Le chemin passait par Le Double qui se trouvait dans ce lieu maintenant boisé et où aucune trace ne subsiste.
Dans cet angle du fleuve se trouvait le village du Double, face à Laspeyre sur l'autre rive. Il y avait une cale de déchargement des marchandises et des personnes. Ici des hommes étaient recrutés au Mas d'Agenais sous l'imposante halle, pouvant également venir de Dunes, des Landes ou du Massif-Central pour occuper tous les postes de manutentionnaires proposés, pour les quelques mois de navigation. Ils vivaient au Double dans des maisons de briques et galets à couverture de "rames". Ces rames, des roseaux poussant librement sur les berges, procuraient une couverture bon marché de proximité. Le sol de terre battue était recouvert de "téoulines" ou carreaux de terre cuite de même nature que ceux des murs. Le village, quasi de plain- pied avec Garonne et donc soumis à ses crues fréquentes ne survit pas à celle, terrible, de 1875. La voie ferrée, le canal tous proches vont donner le coup de grâce aux mariniers. En 1876, le village est abandonné pour la première terrasse de Garonne plus protégée.





Passé le bois où fut le Double, les inondations ont depuis longtemps dispersé les restes de ces maisons de journaliers, plus rien n'est visible d'une quelconque vie. Toutefois sur le chemin et dans les champs, comme on peut le voir sur cette image ci-dessus, beaucoup de petits morceaux de brique rouge et parfois des morceaux épais de téoulites, et d'autres plus fins et bombés, sans doute de cruches ou d'assiettes. Sinon d'où viendraient-ils en si grand nombre? Emouvant!







Une maison maintenant abandonnée, juste un peu plus loin, sans doute semblable aux antiques maisons du Double avec des aménagements plus tardif.





Détail des murs et ses bande de téoulines et galets joliment penchés.


Un belle maison de pierre de St Sixte.


Jolie retenue d'eau.



Curiosités du jour


Le mimosa est en pleine confusion : il se croit au printemps car on voit déjà les petits bourgeons jaune.





Et ces moutons très conviviaux qui nous appellent et viennent nous voir....

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